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Carnets de voyage

Bienvenue en terre d'espoir

Mes petits voisins au village de Hohoe.
Mes petits voisins au village de Hohoe.
Photos : Nicolas Demers-Labrousse

19 mars 2009

Nicolas Demers-Labrousse, étudiant à la maîtrise en études politiques appliquées avec chemi-nement en relations internationales

«Mon frère canadien, te voilà de retour… tu ne nous as pas oubliés?»

La première que fois que j'ai atterri en sol ghanéen, l'idée d'y séjourner trois fois et d'y monter un projet en collaboration avec l'Université de Sherbrooke ne m'effleurait même pas l'esprit. Eh bien, trois ans après ma toute première visite dans ce pays anglophone d'Afrique de l'Ouest, me voilà encore une fois de retour sur cette terre aux mille et un sourires!

Me voici au Ghana, en route vers Hohoe, le petit village où je travaillerai. Entassé au milieu d'une quinzaine de Ghanéens dans un petit tro-tro (minifourgonnette servant de transport en commun) sous une chaleur accablante, je regarde défiler le paysage d'une Afrique dont on nous laisse rarement voir le visage. Une Afrique d'un vert luxuriant, où l'eau ruisselle jusque dans les plus petits villages de la région et où les divisions sociales, les conflits culturels ou religieux sont perçus comme une aberration nous éloignant de l'unité nationale.

Les retrouvailles

Rien n'a changé depuis ma dernière visite : la vendeuse de bananes est installée au même endroit!
Rien n'a changé depuis ma dernière visite : la vendeuse de bananes est installée au même endroit!

À ma grande surprise, dès mon arrivée au village, les gens se souviennent encore de mon nom. Rien n'a changé : la vendeuse de bananes est installée au même endroit, il faut encore faire un grand tour pour ne pas tomber dans un trou au milieu de la route qui n'a jamais été rempli, et ma chambre n'a pas connu d'autre occupant pendant mon absence. Comme si le temps n'arrivait pas à faire vieillir cet endroit.

Lorsque je marche dans la rue, je reconnais plusieurs visages; les gens m'interpellent par mon nom et sont étonnés du fait que je sois encore une fois de retour chez eux, dans leur village. Quelle joie d'être si loin de chez soi, mais de se sentir tout de même comme à la maison!

Ayant travaillé dans un orphelinat de la région pendant plus de cinq mois durant les dernières années, mon plus beau cadeau a été de revoir le visage des jeunes orphelins de cette petite école. En route pour me rendre à l'orphelinat, j'espérais de tout cœur que ces enfants se souviennent encore un peu de moi. Agréable surprise : dès que j'ai posé les pieds dans la cour de l'établissement, une cinquantaine de jeunes orphelins se sont rués sur moi. Ils se souvenaient de mon nom, ils se souvenaient également de quelques phrases françaises que je leur avais apprises, et ils chantaient des chansons reggae que je leur avais enseignées.

Le simple fait de revoir leur sourire, de constater à quel point ils ont grandi en quelques années et d'avoir tenu ma promesse lorsque je leur disais que je serais bientôt de retour valait tout mon séjour au Ghana! Quelle scène mémorable…

Perspectives d'avenir

Les villageoises au travail.
Les villageoises au travail.

Mon retour dans cet État africain s'est effectué au lendemain d'une élection, sans aucun climat d'insécurité ou de désordre sociopolitique lié à l'enjeu de la transition démocratique. Yes we can : le Ghana nous l'a récemment prouvé par la tenue d'une élection juste et impartiale, créant ainsi un précédent en Afrique subsaharienne.

Malgré la stabilité économique et politique actuelle, force est de reconnaître que le clivage entre la capitale et les diverses régions du Ghana est frappant. Par exemple, au niveau de l'accessibilité de l'éducation, l'élève vivant à Accra (la capitale du pays) aura un avantage certain sur celui vivant dans un village éloigné.

C'est d'ailleurs en partant de ce constat que l'idée de monter un projet en collaboration avec l'École de politique appliquée de l'Université de Sherbrooke est née. Les stagiaires participant à ce projet travailleront de concert avec l'ONG ghanéenne World Solidarity and Volontary Work à émettre des recommandations permettant d'améliorer les conditions d'éducation dans les milieux ruraux.

Je me souviens d'une discussion avec un Togolais œuvrant au Ghana. Je lui ai demandé par curiosité pourquoi il ne travaillait pas plutôt dans son pays d'origine. Il m'a répondu qu'au Ghana, la stabilité socioéconomique permet à un projet qu'on démarre de prendre racine, de pousser, puis de porter fruit. Je partage ce point de vue; au fil des années, le projet que j'avais initié s'est grandement développé grâce à ce contexte particulier.

En m'engageant dans la coopération internationale, j'étais motivé par le désir d'apporter ma modeste contribution au mieux-être de semblables qui n'ont pas eu ma chance. Je me trouvais privilégié de pouvoir bénéficier d'une formation dans une université qui comprend ces enjeux.

Choisir le Ghana comme premier terrain pour l'application de mes connaissances, c'était choisir un milieu réceptif et favorable compte tenu de la structure sociopolitique et du désir de progression qui anime cette population. Ce que je ne savais pas, c'est que les gens de ce pays allaient m'apporter beaucoup plus que ce que je pouvais moi-même leur apporter…